Vous avez dit continuité éducative ?
Après 2 mois de confinement, la pandémie se calme et la nécessité de reprendre les activités touche aussi les enfants. C’est dit explicitement dans le communiqué de la Société Française de Pédiatrie, la poursuite du confinement aurait des effets délétères sur les enfants (malbouffe , sédentarité, carences éducatives, climat de violences , addictions aux écrans , troubles du comportement …). Cette maladie que l’on apprends à connaitre semble bénigne chez la grande majorité des petits enfants, en dépit d’interrogations pour les plus grands ( Syndrome Kawasaki, myocardite ).
Il faut donc entrer dans une seconde phase qui semble bien plus complexe que la précédente, celle du déconfinement.
Les enfants de familles précaires qui auraient le plus besoin de retrouver le chemin de l’école restent confinés car leur parents ont peur.
Les enfants des familles aisées restent chez eux avec leurs jardins, dans les résidences secondaires, avec des ordinateurs et des parents qui peuvent leur faire la classe. C’est moins grave mais quid du brassage social qui fait progresser les plus carencés ?
Le choix de mettre ou non les enfants à l’école est pour les parents un choix cornélien. Pour certains parents cela revient à devoir choisir entre leur retour au travail et la santé de leur enfant puisque l’école n’est plus obligatoire.
En allant sur le terrain, on le constate : les ambiances sont très différentes entre les crèches et les écoles maternelles.
Les auxiliaires de puériculture et les éducateurs de jeunes enfants gardent leur exigences professionnelle avec le bien de l’enfant au centre de leurs préoccupations. Pour elles c’est non négociable. Leur culture professionnelle paramédicale les aident à concevoir les recommandations d’hygiène. Elles ne sont pas envahies par l’angoisse.
Les crèches ne semblent pas avoir trop évolué : les enfants jouent, tombent, les agents les accompagnent à distance mais si un câlin est nécessaire, elles sont présentes et rassurantes Elles ne semblent pas inquiètes mais assez sereines.
Les enseignants en maternelle souffrent beaucoup plus : ils sont pris dans le filet entre les inquiétudes des parents, les leurs et les recommandations de leur ministre de tutelle (60 pages de mesures à appliquer strictement). Ces recommandations sont pour la plupart inapplicables.
Des enfants mangent seuls devant leur assiette à 2 mètres les uns des autres, ils n’ont pas le droit de jouer, de se toucher, de s’échanger des crayons, des jeux. Ils sont tristes et inhibés. Les cours d’école sont sinistres et silencieuses.
Il devient indispensable si l’on ne veut pas sacrifier l’épanouissement de cette tranche d’âge où tout se joue, de rendre plus cohérent notre système éducatif de la Petite Enfance.
Les enseignants de maternelles, les éducateurs de jeunes enfants, les auxiliaires de puériculture devraient avoir une formation commune et des projets pédagogiques communs.
Laissons les professionnels prendre les mesures sanitaires qu’elles jugent nécessaires et faisons leur confiance. Le sanitaire doit-il prendre le dessus sur l’épanouissement et la pédagogie ?
Non, les enfants ne naissent pas à 3 ans avec un cartable sur le dos, les 3 premières années sont celles de du développement moteur, affectif, sensoriel qui permet ensuite la réussite scolaire : c’est pourquoi travailler sur une continuité entre la petite enfance et l’école est plus important que jamais.
Ecrit par Brigitte Collet, Pédiatre et élue à Bordeaux, pour EPEPE.